(109) un jour de bleu

à MCG, en éternelle rédemption

(1979)

UN JOUR DE BLEU

Un jour de bleu et de lumière,

En quête d'air, en plein été,

Clamant "je serai la dernière",

Tu m'es venue, radieuse et bée

J'ai tout aimé de ton serment,

Ton beau pays, ton chant, tes fièvres,

Tes peurs et ton halètement,

Le goût du miel bu à tes lèvres

Mais j'avais mal à mon grand cœur 

Et bien trop froid à ma pauvre âme

Pour m'emparer d'un tel bonheur ...

Je l'ai trahi pour d'autres flammes

Ce n'était rien que quelques fleurs,

Ce n'était rien que quelques brames ...

Tu me laissas dans mon malheur

Et t'en fus loin vivre ton drame

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(108) ode à la médiocrité

     

Dmitry SOLONIN - Into the mouth of the Leviathan

 

 

 

à MOURAD 

et à tous ceux qui lui ressemblent,

en témoignage compatissant et respectueux

 

ODE À LA MÉDIOCRITÉ 

Elle croît et s'épanouit,

Empeste, infecte et se répand

D'imbéciles en abrutis,

De parvenus en ignorants

Plus contagieuse et malfaisante

Que la peste et le choléra,

Pollinisant* toute la fiente*

Elle ensevelit ses parias*

Partout elle s'impatronise*,

Décrète loi, dicte le bien,

Condamne, absout et expertise,

Dit le mal, ne doute de rien

L'Agora* toute est son domaine ;

Sans foi, sans âme et sans frontières,

De sa langue une et souveraine

Elle régente Ciel et terre

Tragi-comique Léviathan*

À l'affligeant référentiel*

Elle bâtit ces nouveaux temps

Où le Jardin devient poubelle

Et cet empire universel

Dont tout célèbre la laideur,

Pour ses légions d'ouailles* fidèles

Est l'archétype* des valeurs

Adorateurs du dieu Pognon

Et de la fée Célébrité,

Tyrans, tartuffes ou bouffons,

Rupins*, larbins, dégénérés,

Saltimbanques* et rappeurs,

Ecrivaillons* et journaleux*,

Influenceuses, footballeurs,

Il n'est d'espace que pour eux !

Dans l'ambroisie* à pleines dents

Et le nectar* à pleine bouche,

Ivres d'eux-mêmes dans le vent,

Ils ont du vide fait leur couche

Car cette armée du grand déclin

N'a d'horizon ni d'espérance

Qu'appartenir au Saint des Saints*

Dans le cloaque* en déchéance 

Minables ou mégalomanes,

Boursicoteurs impénitents,

Pareils à un grand troupeau d'ânes

Ils braient d'un même et seul braiement

Kim Jong, Donald et Vladimir,

Ayatollahs et Troglodytes,

Bibi, Recep et Dom Jaïr,

Elle a les chefs qu'elle mérite* ...

 

Troufions* croulant sous leurs médailles,

Nababs* perchés sur leurs millions,

Oualous* singés par leur marmaille,

Salauds, crétins et histrions*,

 

Souillant l'honneur et la beauté,

Brassant le vent et les ordures

Martyrisant l'humanité,

Salissant l'art et la culture,

 

   ... Ils ne seraient rien que poussière

Dans l'infini du firmament

Mais ... leur vacarme fait se taire

Les beaux esprits et les savants ...

 

Malheur à toi la bête immonde

Qui partout fais désespérer,

Du fond de nos peines profondes

Malheur à toi MÉDIOCRITÉ !

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Petit lexique rapide & Clés de compréhension pour mes jeunes lecteurs

(selon l’ordre d’apparition des mots marqués d'une astérisque * dans le texte)

 

- polliniser : ensemencer, féconder

- fiente : excréments de certains animaux

 - paria : personne rejetée, exclue d'un milieu, d'un groupe

- s'impatroniser : devenir le maitre par ruse ou par force

- Agora : nom de la place publique des villes de Grèce antique, forum

- LÉVIATHAN : terrible monstre mythologique représentant le danger absolu

- référentiel : ensemble des caractéristiques ou valeurs

- ouaille : croyant, fidèle, sujet,

- archétype : modèle idéal

- rupin : bourgeois, riche (argot)

- saltimbanque : amuseur de rue ou de foire, artiste, acteur

- écrivaillon : mauvais écrivain

- journaleux : mauvais journaliste

- AMBROISIE : aliment réservé aux dieux dans la mythologie grecque 

- NECTAR : boisson des dieux dans la mythologie grecque

- "Saint des Saints" : (expression) partie la plus sacrée du Temple de Jérusalem

- cloaque : bourbier, lieu très malpropre

- mérite : vous reconnaîtrez facilement ces funestes personnes

- troufion : soldat de la plus basse classe

- nabab : homme très riche de l'Inde musulmane, milliardaire

- histrion : mauvais acteur, sinistre individu qui se donne en spectacle

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(107) Soir d'été à Aïn-Sbit

Les Meules - Vincent VAN GOGH

                                                  

                                                                                                                à  PAPA 

Soir d'été à AÏN-SBIT *

Quand l'ombre s'allongeait au pied des meules blondes

Qu'érigeaient suffoquant nos vaillants ouvriers,

Et qu'enfin, venue d'ouest, la brise* vagabonde

Affleurait* les rameaux du frugal* olivier,

Quand cessaient les appels du grillon stridulant*

Et son roucoulement lascif la tourterelle,

Quand le troupeau repu s'en retournait des champs,

Enivré de soleil, boire à ses écuelles*,

Dans la douceur du soir aux relents de purin*,

Adossés au chariot, en long conciliabule,

Père et son caporal organisaient demain

En remerciant le Ciel, Maitre des canicules ...

Les adultes comptaient, la marmaille jouait ;

Un moment affranchis de toute surveillance,

- Fils de pauvre ou de riche, honte à qui s'en souciait -

Nous, entre chien et loup, n'étions que connivence

Et puis l'ordre tombait, sonnant le couvre-feu,

Les péons* s'égaillaient* et leur progéniture ...

Je ne le savais pas mais que j'étais heureux

En ces temps ingénus et leurs gais clairs-obscurs !

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auteur :  Camal  Elmili-Hamayed

 

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Petit lexique rapide & Clés de compréhension pour mes jeunes lecteurs

(selon l’ordre d’apparition des mots marqués d'une astérisque * dans le texte)

 

- Aïn-Sbit : lieu de ma naissance, minuscule bourgade agricole, à une petite demi- heure de Fès en allant vers Taza

- brise d'ouest : ce léger vent frais, appelé gherbi en dialecte marocain, est espéré chaque soir dans ces régions aux étés caniculaires

- affleurer : ici, au sens de apparaître à la surface, arriver au niveau de,

- frugal : l'olivier est frugal parce-qu'il est sobre et supporte bien la sécheresse 

- striduler : crier, en parlant de certains insectes, cigale, sauterelle, criquet ...

- écuelle : récipient rustique dans lequel on donne à boire et à manger aux animaux  

- purin : liquide odorant qui s'écoule du fumier

- connivence : complicité

- "entre chien et loup" : expression signifiant "à la tombée du jour"

- péon : dénomination des ouvriers-paysans très pauvres d'Amérique du Sud, un peu comparables à leurs homologues d'Afrique du Nord

- s'égailler : se disperser, partir dans toutes les directions (à ne pas confondre avec "s'égayer", se divertir) 

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(106) La Croix et le Chemin

" Le Cri " de Edward MUNCH  -1896-

 LA CROIX ET LE CHEMIN

C'est une croix et un chemin,

Amère et lourde, aveugle et sourd,

Je me lève chaque matin

Et l'âme en peine et le cœur lourd

Je crains la mort et crains la vie,

Demain m'inquiète, hier m'obsède

Et l'entre-deux* n'est qu'aujourd'hui,

Fieffé* menteur, simple intermède

Pas un bonheur ni un amour

Qui ne se paie de flots de larmes,

Pas une nuit ni un seul jour

Que n'assombrisse quelqu'alarme

La mer reflue, tous les vents tournent,

Non l'infortune et ses tourments

Qui rudoient l'âme et la retournent

Comme un fétu* au firmament*

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auteur :  Camal  Elmili-Hamayed

 

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Sculpture de JOHNSON TSANG

Petit lexique rapide & Clés de compréhension pour mes jeunes lecteurs

(selon l’ordre d’apparition des mots marqués d'une astérisque * dans le texte)

 

- entre-deux :  partie ou état séparant 2 choses, 2 moments

- fieffé(e) : qui a un défaut au plus haut degré, un "sacré" menteur, vicieux ...

- fétu : quelque chose de très léger, insignifiant, comme "un fétu de paille"

- firmament : l'immensité de l'univers, l'ensemble de la voûte céleste, le ciel

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(105) Mes illusions

 

" NUAGE CIEL D'AZUR "
Peinture de Robert GONSALVES (Canadien + 2017)

Mes illusions

Longtemps j'ai cru mes illusions

Filles perdues de mes erreurs

Comme le fleuve en alluvions*

Se ruine au gré* des orpailleurs*

J'allais, en guerre avec moi-même,

Pleurant mon or et mes candeurs,

Réenchantant mes requiem* 

En m'inventant de nouveaux leurres

De chaque nuit poignait* un jour

Moins insouciant mais délesté

Des faux-semblants et des atours

Qui cachent tous la vérité

... Une aube enfin, entre mes pleurs,

Telle un diamant dans le bourbier,

Je vis briller, reine des fleurs,

La paix en soi qu'est la fierté ...

Adieu rancœurs et anathèmes* !

N'espérant plus, j'avais trouvé

La panacée* à mes dilemmes*

Et le chemin de la clarté

Car - gloire à vous mes illusions,

  Muses de mes piètres bonheurs -

  En les montrant meilleurs qu'ils sont

Vous me laissiez frères et sœurs ...

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auteur :  Camal  Elmili-Hamayed

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Petit lexique rapide & Clés de compréhension pour mes jeunes lecteurs
(selon l'ordre d’apparition des mots dans le texte)

- alluvions : ce sont les sédiments fertiles, véritable richesse agricole, qu'un fleuve

                     peut abandonner sur son parcours et qui contiennent même parfois des paillettes d'or

- au gré : à la satisfaction, au bonheur, au plaisir

- orpailleur : chercheur d'or qui lave les alluvions aurifères pour en extraire les paillettes

- requiem : musique composée pour la prière chrétienne des morts

- poignait : imparfait du verbe poindre, apparaître, naître

- anathème (un) : condamnation sévère, réprobation, malédiction

- panacée (une) : c'est le fantasme légendaire d'un remède universel capable de guérir

                             TOUS les maux et, au figuré, de résoudre tous les problèmes

- dilemme (un) : choix difficile à effectuer

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(104) Nadia

💙  à R.S.N. mon beau trio d'amour

La Décalcomanie (1966)        

L'une des dernières œuvres de  René MAGRITTE

NADIA

Dans tes yeux je me vois mourir

Et ce que tu seras sans moi

Qui t'ai aidée à moins souffrir

Ne me met pas le cœur en joie

Je m'en vais nu comme venu

Et bien trop las* pour regretter

Ni les rêves que j'ai perdus

Ni les bonheurs que j'ai gâchés

Oui ma main va lâcher la tienne

Et ma bouche déjà s'amuït*,

Et l'heure approche où chaque peine

Va te redire " il est parti " ...

Je t'ai donné ce que j'ai pu,

Ce que j'avais ou n'avais pas,

Et tu me l'as mil fois rendu

En te nichant* dedans mes bras

Un jour* nouveau pour toi se lève

Comme un linceul* sur l'âpreté*

De celui qui pour moi s'achève,

Oublie l'hiver, gloire à l'été !

Pour t'orienter dans le brouillard,

Le soir tombé ou tôt matin 

Affranchis-toi* de mon regard,

Respecte hier et vis demain

Tous les voyages ont un terme,

Les beaux contes n'ont pas de fin,

Non, je n'ai pas semé le germe*

Mais ... tu fleuris dans mon jardin

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auteur :  Camal  Elmili-Hamayed

 

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Petit lexique rapide & Clés de compréhension pour mes jeunes lecteurs

(selon l’ordre d’apparition des mots dans le texte)

- las : fatigué, moralement épuisé

- s'amuït : du verbe S'AMUÏR, se taire, devenir muet

- nichant : du verbe SE NICHER, faire son nid, s'abriter dans un nid

- jour : ici au sens de nouvelle époque, nouvelle situation

- linceul : drap dans lequel on enveloppe un mort (kfen en arabe)

- âpreté : pénibilité, dureté, rudesse, violence

- s'affranchir de : se libérer de quelque chose ou de quelqu'un, s'en émanciper, s'en délivrer

- germe : ici bien sûr au sens de grain, ferment, origine 

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Les Oiseaux       Georges BRAQUE