« L’Art est une blessure devenue Lumière » Georges Braque

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mercredi 11 août 2010

(13) le Chant de l’homme

Sur tous les âges de mes vies,
Griots, trouvères et chanteurs,
Flotta le souffle de vos dits ;
J’ai su d’Homère mon pays
Et de Virgile ma splendeur.


Oh ! Rutebeuf, ô d’Aubigné,
Votre douleur est bien la mienne,
Dans la colère ou résignée ;
Deubel crevant, mourant Chénier,
Nous sommes bien des mêmes haines.


Car tous les hommes en chacun
Perçant le champ des résonances,
J’entends Nerval dans ma démence,
Saadi enivre mes parfums
Et par Hugo j’aime la France.


Lorsque se perd au fond de moi
Mon âme à blues et à tempêtes,
Voleur de verbe, épris de voix,
Cherchant le nord ou de guingois
Je m’invite chez les poètes.


Désespérés et romantiques,
Visionnaires ou doux rêveurs,
Mystiques purs et beaux parleurs,
Sages, paillards, noirs, excentriques,
Ma grâce a toutes leurs couleurs.


De la pampa de Neruda
Aux eaux sacrées dont fut Tagore,
Ici gaucho, sâdhu là-bas,
En maintes langues que j’ignore
Le chant de l’homme m’envoûta.


Dans son enfer Maïakovski,
Lorca en croix, Darwiche en pleurs,
Hölderlin roi de féérie,
Selon le jour et selon l’heure
Mon mal taisant ont dit le leur.


Chacun d’entre eux m’a tout appris
Baignant mes pages de lumière,
- Dante, Goethe, Marlowe, Schiller –
Étrangers en moi accompli
Comme un écho d’Apollinaire.


Lorsque l’espoir sembla ruiné,
Inaccessible la frontière,
Cassé le rêve, enfui hier,
Trop cruelle la vérité,
Perdu, à nu, l’ami, le frère ;


Quand il fallut paraître fort,
Trouver du sens à un malheur,
Éveiller la beauté qui dort,
Apprendre à regarder la mort,
Donner des gages au bonheur,


Être fou, se perdre, être sage,
Se garder, fuir, s’abandonner,
En maints périlleux voyages
Au-delà de soi hasarder
Certitudes et lourd bagage,


C’est face à vos miroirs sans tain,
Princes aimés et immortels
A tous les peuples souverains,
Que s’éleva par vos échelles
Tout ce qu’en moi il est d’humain.


Si je gravis quelques montagnes 
Et sus l’ivresse du galop,
Ce fut à cru, fouetté de mots
Qui m’ont fait battre la campagne
A la conquête des châteaux.


Rêvez ! Poètes, osez ! Dites !
Par vos bouches transfiguré,
Par vos songes devenus mythes,
Un monde impur a pu tracer
Quelques chemins à ses élites.


Pour vos jardins et vos palais,
Pour les ténèbres de vos âmes,
Vos fulgurances et vos flammes,
Merci Villon, merci Toulet,
Ronsard merci, choukran Khayyâm.


Fils de Calliope et d’Érato,
De Melpomène et de Clio,
Tout en moi bruit de vos chamades
Et c’est toujours par vos bateaux
Que j’ai pu fuir les embuscades.


Ah ! Quelles pâmoisons sublimes,
Scrutant vos routes d’orpailleurs
Scandant leurs chants, saignant leurs cœurs,
Faisant des fleurs de tant de crimes,
Furent un lit à mes humeurs.


Chantres des soirs et des matins,
Des jours glorieux, des heures sombres,
Par vos clartés ô diseurs d’ombres,
Voyageurs fous du drame humain,
Etoiles de mon ciel sans nombre,


Des vents brûlants de Namibie
Jusqu’aux neiges de Laponie,
Où que pointât mon astrolabe,
Il ne fut ciel d’aucun pays
Qui ne ravît mon âme arabe…
_________________________


auteur : Camal  ELMILI HAMAYED

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